YARA
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ANCÊTRE

Norsk Hydro

TYPE DE STRUCTURE

Multinationale

SIÈGE SOCIAL

Oslo (Norvège)

PDG

Svein Tore Holsether

PRINCIPAL ACTIONNAIRE

Ministère norvégien du commerce, de l’industrie et de la pêche (36,2 % des parts)

NOMBRE D’EMPLOYÉ.E.S

16 757

ANNÉE DE CRÉATION

1905

CHIFFRE D’AFFAIRES

13,05 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018

ÉMISSIONS DE GAZ A EFFET DE SERRE

16,6 millions de tonnes de CO² équivalent par an (2018) pour la seule production (et non l’utilisation)

ACTIVITÉS PRINCIPALES

Synthèse d’ammoniac, fabrication d’engrais azotés

PRODUITS COMMERCIALISÉS

YaraBela, YaraVita, YaraTera, YaraLiva, YaraMila, YaraVera

  1. Puteaux, Hauts-de-Seine (92800)
    Bureau commercial
  2. Le Havre, Seine Maritime (76700)
    Usine
  3. Montoir-de-Bretagne, Loire Atlantique (44550)
    Usine
  4. Ambès, Gironde (33810)
    Usine
  5. Pardies, Pyrénées Atlantiques (64150)
    Ancienne usine

AMÉRIQUES

Argentine, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Équateur, États-Unis, Mexique, Paraguay, Uruguay, Vénézuela.

EUROPE

Allemagne, Angleterre, Belgique, Biélorussie, Bosnie, Croatie, Écosse, Espagne, Hongrie, Italie, Moldavie, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Russie, Serbie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine.

AFRIQUE & MOYEN-ORIENT

Afrique du Sud, Algérie, Arabie Saoudite, Botswana, Égypte, Mozambique, Zambie.

ASIE & OCÉANIE

Australie, Chine, Inde, Kazakhstan.

1970

Implantation en Asie, au Moyen-Orient et en Amérique du Nord

1980

Rachat de nombreuses compagnies d’engrais en France, Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni

1990

Développement au Brésil et en Afrique du Sud

2004

Création d’une entité séparée pour l’activité de production d’engrais du nom de Yara

Le vernis pseudo-écolo choisi par Yara pour verdir ses activités porte un nom bien senti : l’agriculture intelligente face au climat. Tout un concept… Ou pas. La multinationale s’appuie sur un discours fondé sur le soutien apporté aux agriculteur·rice·s pour améliorer leurs rendements afin de nourrir la planète, le tout en préservant l’environnement et le climat. Grâce à ce discours bien rodé, Yara se présente comme une entreprise porteuse de solutions face à la crise climatique alors qu’il s’agit plutôt d’un acteur largement responsable de celle-ci. Yara a l’impertinence de mettre en avant le « faible impact » de ses engrais sur le climat alors que :

  • les émissions de gaz à effet de serre de la multinationale ont augmenté de 20 % entre 2009 et 2017 ; [1]
  • l’utilisation d’engrais chimiques a été multipliée par 9 depuis 1960 et que les émissions de gaz à effet de serre qui y sont associées ont doublé sur la même période.[2]

Le concept d’agriculture intelligente face au climat n’est qu’une coquille vide permettant de livrer l’agriculture à l’appétit des multinationales pour faire la promotion des intrants chimiques. Ce concept est soutenu par une alliance internationale (GACSA [3] en anglais) qui regroupe de nombreux lobbys pour faire perdurer une agriculture industrielle destructrice des paysan·ne·s et de l’environnement.[4][5][6]

Les engrais chimiques de Yara sont un véritable cocktail nocif pour le climat, l’environnement et la santé.

Au niveau mondial, les émissions de gaz à effet de serre de la multinationale ont augmenté de 20 % entre 2009 et 2017.[7]

L’industrie des engrais est liée à l’industrie des énergies fossiles car d’énormes quantités d’hydrogène produit à partir d’énergies fossiles[8] sont nécessaires dans le processus de fabrication des engrais chimiques (à base d’azote). Yara est aujourd’hui le premier acheteur de gaz fossile en Europe.[9] Pour respecter l’Accord de Paris sur le Climat et limiter les conséquences irréversibles du dérèglement climatique, aucun nouveau projet de développement des énergies fossiles – pétrole, charbon ou gaz – ne doit voir le jour.[10] Pourtant, Yara n’hésite pas à continuer de développer des projets industriels reposant sur l’exploitation du de gaz liquéfié (avec des émissions de gaz à effet de serre encore plus importantes que pour le gaz non-liquéfié), jusque dans les territoires déjà les plus impactés par les conséquences du dérèglement climatique, comme au Mozambique. Une partie des réserves de gaz découvertes dans le bassin de Rovuma au Mozambique [11] devrait en effet bénéficier à cette multinationale, au mépris du respect de l’environnement et des populations locales.[12]

Le recours aux engrais chimiques de synthèse est également à l’origine d’émissions de protoxyde d’azote, un puissant gaz à effet de serre. 78 % des émissions de protoxyde d’azote [13] sont imputables à l’agriculture. Ce gaz est émis lors de la phase de production dans les usines mais aussi lors de l’utilisation des engrais dans les champs. En France, premier pays consommateur d’engrais chimiques en Europe,[14] c’est l’entreprise Yara qui domine le secteur des engrais à base d’azote.[15]

Les engrais chimiques azotés composés d’ammoniac sont aussi à l’origine de particule fines particulièrement nocives pour la santé (asthme, maladies respiratoires, allergies, accidents cardiovasculaires) et les milieux naturels. L’agriculture représente 94 % des émissions d’ammoniac françaises en 2017 et la première source de ces émissions revient aux engrais de synthèse (29 %).[16] Le ruissellement des engrais et plus particulièrement des nitrates joue aussi un rôle majeur dans la formation d’étendues d’eau pauvres en oxygène qui détruisent la biodiversité. Les nitrates sont aujourd’hui le contaminant le plus répandu au monde dans les aquifères.[17]

Mais cette pollution de l’air et de l’eau se retrouve aussi sur les sites de production des engrais. En Loire-Atlantique, à Montoir-de-Bretagne, Yara continue de contrevenir aux règles environnementales malgré les mises en demeure de l’État. La tour principale de production rejette deux fois plus de poussières que le seuil autorisé et ne dispose d’aucune station de traitement des effluents industriels qui pourraient mener à la prolifération des algues vertes. [18] Concentration du secteur des engrais chimiques, prix des matières premières et volatilité des prix agricoles contribuent largement à porter atteinte à l’autonomie des paysan·ne·s Au niveau mondial, le recours aux engrais de synthèse ne cesse d’augmenter, créant une dépendance toujours plus forte des paysan.ne.s aux intrants chimiques dont les dépenses représentent 14,1 % des consommations d’une ferme en France en moyenne en 2019.

Concentration du secteur des engrais chimiques, prix des matières premières et volatilité des prix agricoles contribuent largement à porter atteinte à l’autonomie des paysan·ne·s

Au niveau mondial, le recours aux engrais de synthèse ne cesse d’augmenter, créant une dépendance toujours plus forte des paysan.ne.s aux intrants chimiques dont les dépenses représentent 14,1 % des consommations d’une ferme en France en moyenne en 2019.[19]

Dans les pays européens comme la France, le secteur des engrais est fortement concentré : en 2010, seuls deux industriels, Yara et GPN (ex-filiale de Total qui appartient désormais au groupe autrichien Borealis) dominent le marché des engrais azotés et un seul acteur, le groupe Roullier, domine largement le marché des engrais composés. Une étude a montré qu’entre 1970 et 2002, le prix des engrais en Europe de l’Ouest avait bondi de 123 % et que la hausse des prix était corrélée au niveau de concentration du secteur.[20]

Dans les engrais de synthèse, on retrouve principalement de l’azote, lui même fabriqué à partir de gaz fossile. En 2013, le gaz représentait 60 % du prix de vente des engrais azotés. [21]Le prix des engrais de synthèse est donc directement lié au cours de l’énergie, et particulièrement du gaz fossile,[22] lui-même très volatil. Cette volatilité des prix compromet sérieusement l’autonomie des paysan·ne·s en les plaçant dans une situation de vulnérabilité accrue.

Au niveau national, comme au niveau européen ou international, Yara déploie des efforts considérables pour accroître ses activités climaticides. Contrairement aux belles images que souhaite donner Yara sur sa volonté de s’impliquer dans la lutte contre la crise climatique, son énergie est surtout dépensée dans des activités de lobbying pour maintenir sa mainmise sur le marché des engrais. À l’échelon européen, Yara est membre de 5 groupes puissants de lobbying qui défendent l’agriculture industrielle et le développement de l’industrie du gaz (y compris le gaz de schiste) : Fertilizers Europe, International Fertilizer Association, Friends of Europe, Cool Farm Alliance et CEFIC (the European Chemical Industry Council) et a dépensé depuis 2010 plus de 11 millions d’euros pour ces lobbys. [23] À l’ONU, lors des conférences sur le climat (COP), Yara participe même à des discussions officielles malgré sa responsabilité majeure dans la crise climatique.[24]

L’implication de Yara dans des structures comme l’Alliance globale pour une agriculture intelligente face au climat lui permet de promouvoir ses fausses solutions vers de nouveaux marchés comme les pays africains. Un déploiement stratégique que l’on observe en Afrique de l’Est, soutenu par Bill Gates[25] dont la Fondation a financé à hauteur de 315 millions de dollars le One planet Summit organisé par Emmanuel Macron en 2017 avec pour objectif de développer la recherche dans l’agriculture, notamment sur les question de fertilité des sols.[26]

Ces jeux d’influence n’ont que trop duré et les pouvoirs publics ont le devoir d’adopter desbmesures fortes pour mettre fin aux activités climaticides de l’industrie des engrais, plutôt que de s’en faire les complices.

1

Le renforcement de la taxe liée à la production des engrais azotés de synthèse et la mise en place d’une taxe liée à leur utilisation afin de tenir compte des impacts négatifs sur la santé et l’environnement

2

L’obligation d’inclure des légumineuses dans les rotations de cultures pour obtenir des aides directes de la politique agricole commune (PAC)

3

L’exclusion des engrais de synthèse pour la fertilisation des prairies dans les mesures environnementales pouvant donner lieu à des paiements de la PAC

4

Le soutien à l’agriculture biologique (AB) dans les mesures environnementales pouvant donner lieu à des paiements de la PAC

5

La suppression des aides pour les monocultures, les rotations de courte durée et l’élevage intensif industriel qui conduisent à la concentration des terres agricoles et à leur spécialisation au détriment d’une gestion vertueuse de la fertilisation

6

Le financement de l’accompagnement des paysan.ne.s dans la diversification de leurs activités (élevage à l’herbe et production de légumineuses pour la consommation humaine en particulier) via les aides de la PAC.

[1] Rapports annuels de Yara

[2] IPCC, Climate Change and Land, Chapter 1, Executive summary, august 2019

[3] Global Alliance for Climate-Smart Agriculture

[4] GRAIN, “The exxons of agriculture”, 30 September 2015

[5] CIDSE,  » Climate-smart revolution … or green washing 2.0? », May 2015

[6] Attac France et La Confédération Paysanne, « La “climate smart agriculture” une agriculture livrée à la finance carbone et aux multinationales, » mars 2015

[7] Rapports annuels de Yara

[8] L’hydrogène en 10 points 

[9] Rapport annuel de Yara 2017 (p.15)

[10] Oil Change International, Burning the gas ‘bridge fuel’ myth: why gas is not clean, cheap, or necessary, 2019

[11] Article « Le gaz au Mozambique« , publié par la Direction Générale du Trésor public

[12] Publication des Amis de la Terre, « La France amorce une bombe climatique au large du Mozambique »

[13] En moyenne entre 2007 et 2016 (Source : GIEC, Rapport sur les terres, 2019, SPM, p.9), IPCC, Climate Change and Land, Summary for policymakers, august 2019

[14] Article d’Eurostat 

[15] Ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, Etat perspectives et enjeux du marché des engrais, janvier 2010

[16] Citepa, Rapport Secten, édition 2019, p.87 et 89

[17] FAO, More people, more food, worse water ?, 2018, p.65

[18] Le Monde, A Montoir-de-Bretagne, un site Seveso hors-la-loi, 7 décembre 2019

[19] pondération de l’indice IPAMPA

[20] International Food Policy Research Institute, Effects of import duty elimination on competition in the European Union (EU) Fertilizer Market, 2016

[21] Analyses et Perspectives, n°1306, juillet 2013

[22] « On observe une multiplication par 3 en moyenne du prix de l’ammoniaque et de l’urée entre 1999 et 2006, ce qui correspond à peu près à l’évolution du prix du gaz naturel. » Ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche, Etat, perspectives et enjeux du marché des engrais, janvier 2010

[23] Article de Corporate Europe Observatory 

[24] Rapport d’energies2050.org

[25] Article « Why I love fertilizer »

[26] Article de Sciences et Avenir